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Contagion

Affiche du film "Contagion"

© 2011 Warner Bros. − Tous droits réservés.

« Film plat », « un ennui contagieux »,  « casting prestigieux mais sous-exploité »… A lire certaines critiques, un film catastrophe se doit d’aligner rebondissements multiples, grand spectacle en pagaille et pics émotionnels sur une régularité toute métronomique. Un attachement aux codes du blockbuster épidémiques plutôt étonnant et complètement à côté de la plaque quand on regarde un peu les intentions de Soderbergh sur ce projet.

Contagion est un docu drama, un film s’attachant à un certain réalisme. Exit donc les héros sauveurs d’humanité ou les personnages aux parcours spectaculaires. Un indice : ce n’est d’ailleurs pas l’une des stars du casting qui sera d’un vrai secours pour une humanité en plein effondrement. Une démarche qui n’est pas exempt de défauts: on regrette ainsi les passages où le drama gagne un peu trop de terrain, à l’image de ce kidnapping au twist final inutile et injectant une émotion bien superficielle. Pour le reste, le film dépeint bien rivalités scientifiques, suspicions de favoritisme dans l’attribution des vaccins, couacs dans la communication de crise (ici sublimés par un Jude Law, blogueur conspirationniste et hypra-influent, tout en ambiguïté) et culpabilité des chefs quand les employés choppent le virus en plein boulot…

Là où le film est saisissant, c’est par la mécanique froide qu’il met en scène, l’insensibilité de rigueur d’une administration américaine devant gérer une crise alors que se meurent des millions de personnes et l’apparente inhumanité de certaines décisions prises. Une étrangeté certaine dans cette approche anti-émotionnelle portée en partie par le casting et son cocktail de superstars ciné (Kate Winslet, Laurence Fishburne…) et d’apparitions plaisantes (Josie « Dream Home » Ho, Bryan « Breaking Bad » Cranston). En effet, malgré une mise en scène intimiste, la plupart de ces personnages ne se dévoilent jamais vraiment et semblent échapper au spectateur. A cette machine présentée comme impénétrable et rapidement dépassée par l’étendue de la pandémie s’oppose l’incompréhension d’une population jetée très rapidement en pleine apocalypse, ici signifiée par quelques violences et pillages, et surtout résumée à un Matt Damon jouant l’hébétude et la normalité hagarde à l’extrême, remède contre un réel insoutenable et l’écroulement de toute promesse d’avenir.

Souffler sur les dés ne porte pas toujours chance…

Certes il aurait fallu un film de six heures, voire une mini-série, pour vraiment aller au bout de tous les thèmes abordés et Soderbergh donne souvent l’impression de survoler son sujet, parfois même au profit de scènes bien roublardes (la scène de l’autopsie par exemple ou l’acharnement sur Gwyneth Paltrow en général). Mais grâce à sa structure en points de vue multiple, le scénario parvient quand même à couvrir une partie de la complexité de la gestion d’une telle crise à l’échelle mondiale. Il faut aussi considérer que si Soderbergh s’en sortait mieux sur la drogue c’est aussi que Traffic ne comptait que trois intrigues parallèles, cela sur 147 minutes.  Contagion, lui, en compte près d’une dizaine sur 103 minutes.

On regrettera par contre que la facture visuelle proche du réalisme documentaire et l’utilisation d’une Red One s’apparentent ici trop souvent à un prétexte pour limiter les efforts de mise en scène. Entre deux montages alternés, certaines séquences se suivent et se ressemblent sans laisser vraiment quelques images marquantes. On reconnaitra par contre un talent à Soderbergh – pas un génie du 7ème art mais un très bon faiseurpour les subites montées d’angoisse et de paranoïa autour de la transmission virale par le toucher. Un concept ici bien pensé et parfaitement mis en œuvre lors d’une scène terrible où la convivialité d’un bar se transforme sous les yeux d’un scientifique et via quelques plans serrés en promesse de contamination. Autre point noir, la BO est juste insoutenable : Cliff Martinez, pourtant derrière les scores de Drive, livre ici des partitions easy listening sans âme. De la musique au mètre malheureusement appréciée par Soderbergh qui la rend omniprésente voire étouffante.

Finalement sous certains aspects, Contagion est presque aussi bancal que le Solaris du même réalisateur et l’équilibre entre « film d’auteur » et « blockbuster à 50 millions de dollars » reste encore à trouver. Mais l’approche reste originale et le sujet, passionnant, est quand même suffisamment bien mis en œuvre pour tenir en haleine le spectateur tout du long.

Critique par Alex B

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