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Dégel

Affiche du film "Dégel"

© 2009 Brightlight Pictures − Tous droits réservés.

Hum, difficile d’avoir un avis tranché sur ce petit film sorti de nulle part dans l’indifférence la plus totale. Au vu du pitch (des plus en vogue dans cette faste période post-2012) et de l’acteur-vedette (Val Kilmer, qui semble collectionner les nanars), l’on est en droit de se demander : tiens, tiens, s’agirait-il encore d’une énième série B traitant de la fin du monde ? Eh bien non ! Enfin, pas vraiment…

Oui, bon, d’accord, il s’agit indubitablement d’une série B, mais pas celle que l’on pourrait croire. Loin d’être super-original dans le choix de son sujet et sa réalisation, le film réussit tout de même à nous surprendre quant à son contenu qualitatif là où d’autres n’ont même pas réussi à nous amuser. Point de surenchère grand-guignolesque pour masquer l’absence de scénario, d’effets spéciaux foireux ou de jeu d’acteurs insupportable, tout semble ici avoir été fait avec soin et pondération. The Thaw est en réalité autant un film sur le danger de l’intégrisme écologique que sur l’inconscience de l’humanité qui marche peu à peu vers son autodestruction imminente (et méritée ?) avec d’un côté, ceux qui préfèrent se faire une raison (ou plutôt ne pas y penser) et s’éclater le temps qu’il leur reste à passer sur la planète bleue en zone rouge ; et de l’autre, ceux qui ont décidé de faire bouger les choses, quels qu’en soient les moyens (que la fin justifie toujours, n’est-ce pas ?). Une trame pas des plus innovantes, on est bien d’accord, mais qui a le mérite de traiter les deux camps en démontrant aussi bien leurs qualités que leurs défauts respectifs. Alors qu’est-ce qui cloche ? C’est très simple, en dépit de sa bonne volonté, The Thaw manque cruellement de ce petit « quelque chose » qui le ferait passer au stade supérieur d’œuvre véritable, et non de simple divertissement.

Car objectivement, le film est assez réussi : les effets spéciaux sont plus que corrects, les CGI, même s’ils ne cassent pas des briques, sont largement acceptables (dans la lignée de The Mist de Frank Darabont) ; à l’instar des doublages, le jeu des acteurs n’est ni bon ni mauvais mais passable, les relations qui se tissent entre les personnages ont été creusées un minimum pour leur conférer un semblant de profondeur non négligeable pour une série B, l’ambiance huis-clos est efficace et crédible… Alors quoi ? Eh bien, tout d’abord, le film est très inégal. Sous prétexte de vouloir instaurer du suspense, la première partie se déroule sur un rythme vraiment trop lent qui met notre patience à rude épreuve ; résultat : on a l’impression qu’il ne se passe strictement rien et, au final, on finit par s’ennuyer. Par la suite, le film s’améliore, accumulant scènes violentes et crises de panique, les pauvres étudiants se débattant de tout leur instinct de survie pour tenter d’échapper à ce qui pourrait bien causer l’extermination de l’humanité toute entière. L’atmosphère paranoïaque du film, où tous se suspectent les uns les autres d’être contaminés et finissent par s’entretuer, fait vaguement penser à celle de The Thing de John Carpenter, mais en bien moins réussie. Car c’est cela, le gros problème de The Thaw, tous les éléments sont mis à disposition pour nous faire passer un bon moment fort en émotions, mais le film ne parvient jamais à nous faire pénétrer complètement au cœur de l’histoire. On reste pour ainsi dire « en dehors » du film sans jamais se sentir vraiment concerné par le sort des personnages. Même le twist final nous laisse de marbre. Tout au long du film, on a l’impression que le réalisateur a mis un point d’honneur à produire un film de qualité, au scénario élaboré et à la mise en scène soignée pour se distinguer au maximum du lot de séries B fin-du-mondistes du moment, sans pour autant réussir à atteindre pleinement son objectif. A mi-chemin entre la série B telle que nous l’envisageons et le film d’auteur, The Thaw est un film dont l’étrange paradoxe est de nous surprendre et nous décevoir simultanément.

© 2009 Brightlight Pictures − Tous droits réservés.

Autre fait dérangeant, il est difficile de saisir le but central du film : veux t-il faire passer un message ? Si oui, s’agit-il de démontrer la folie du terrorisme écologique ou l’incapacité des gens « à faire des sacrifices » pour sauver la planète, ou carrément les deux ? Et quelle est la position de l’auteur dans tout cela ? Le seul indice qui nous est laissé serait le dénouement final qui révèle un léger parti pris en proposant un regard hautement pessimiste sur le sort qui semble nous attendre. Mais à ce dénouement s’oppose tout le reste du film, qui semble considérer les écologistes fanatiques comme des fous furieux à mettre en laisse.

Toutes ces contradictions nous plongent dans un magma d’incompréhension qui, couplé à l’impression que le film se tient « le cul entre deux chaises », destine The Thaw à ne pas subsister bien longtemps dans les mémoires. Dommage…

Par Emmanuelle Ignacchiti

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