Site icon Films-horreur.com

Red eye – Sous haute pression

Affiche du film "Red eye - Sous haute pression"

© 2005 DreamWorks SKG − Tous droits réservés.

Wes Craven, maître incontesté du rape-and-revenge depuis ses excellents La Dernière Maison sur la Gauche et La Colline a des Yeux dans les années 70, mais aussi inventeur génial du personnage mythique, sadique et griffu de Freddy Krueger, s’essaye au thriller en 2004 avec Red Eye / Sous Haute Pression. Bien que ce film ne fasse pas vraiment preuve d’une formidable originalité, force est de reconnaitre cependant que le réalisateur tant plébiscité s’en sort plus que bien pour une « première fois » et témoigne d’une certaine habileté dans le maniement des codes inhérents au genre qui a piqué sa curiosité.

En effet, le principal moteur de Red Eye consiste en l’élaboration progressive d’un suspense haletant au sein d’une situation-catastrophe plutôt ordinaire dans ce genre de films, l’avion servant de décor principal à la confrontation entre Lisa Reisert (Rachel McAdams ; Jeux de Pouvoir ; Sherlock Holmes), jeune femme sage et consciencieuse pour qui le travail passe avant tout, et son inquiétant voisin de siège Jack Reventer (Cillian Murphy ; 28 Jours Plus Tard ; Sunshine ; Inception), qui n’hésitera pas à employer « les grands moyens » pour parvenir à ses fins. Dès l’instant où ils se rencontrent à l’aéroport, le spectateur sent qu’un grand soin a été apporté aux dialogues, souvent incisifs, entre ces deux personnages hautement charismatiques. Mention spéciale à Cillian Murphy, qui comme toujours excelle dans ce genre de rôle d’homme à la beauté glaciale, sophistiqué, charmeur et raffiné mais dont le regard hypnotique semble cacher une folie latente aussi terrifiante qu’envoûtante. Son jeu peut d’ailleurs faire penser à celui qu’il adoptera quatre ans plus tard dans Batman : The Dark Knight, de Christopher Nolan, dans lequel il interprète le Dr Jonathan Crane / L’Épouvantail.

La première partie de Red Eye nous propose donc de suivre l’insidieux processus de rapprochement opéré par Reventer pour peu à peu gagner la confiance de sa « proie », jusqu’à ce que celui-ci dévoile brusquement son vrai visage et occasionne par là même un retournement de situation particulièrement bien amené.  La suite du film est ainsi rythmée par les efforts désespérés que déploie Lisa pour se dépêtrer du terrible piège qui s’est refermé sur elle au moment où elle s’y attendait le moins et qui va complètement bouleverser sa vie ainsi que celle de ceux qui lui sont chers. La tension qui émane de ce face-à-face impitoyable fonctionne à merveille et parvient sans problème à nous immerger au cœur d’une ambiance hostile et angoissante, entre tentatives d’intimidation, usages répétés de la force et moyens de pression toujours plus fallacieux. Enfin, l’ingéniosité dont fait preuve Lisa pour tromper l’attention de son ravisseur contribue également à alimenter le suspense de ce huis-clos réellement prenant et sublimé par les interprétations sans faille de ses deux acteurs principaux décidément fort talentueux et parfaitement à l’aise dans leurs rôles respectifs.

Niveau esthétique, le film est loin d’être inoubliable et se contente du minimum syndical : la réalisation se montre soignée sans pour autant casser des briques, la musique est assez satisfaisante pour créer une atmosphère lourde et oppressante mais reste cependant plus qu’anecdotique, la photographie demeure des plus banales ; bref, on peut dire sans trop craindre de s’avancer que Red Eye ne se singularise pas vraiment par le traitement formel qui lui est consacré. Non, l’intérêt du film est tout autre, en réalité centré sur les émotions vives qui circulent au sein de cet échange musclé autour duquel se construit l’intégralité de l’intrigue.

La dernière partie du film s’apparente d’ailleurs à une véritable explosion de haine contenue tout au long du vol qui aurait enfin la possibilité de s’extérioriser sans demi-mesure. La brutale métamorphose de Cillian Murphy est par ailleurs assez impressionnante, le jeune homme calme et réfléchi qui jusqu’à présent gardait tout contrôle de la situation se muant tout à coup en bête sauvage au visage révulsé qu’un seul et unique affront aura achevé de faire basculer dans la folie la plus primale. L’aspect soudainement très « boggeyman » de son personnage névrotique et assoiffé de vengeance marque bien évidemment la signature du réalisateur sacré « maître de l’horreur » qui parvint à redorer le blason du slasher durant les années 90 avec son superbe Scream. Cette dimension purement horrifique (bien qu’à très petite dose) clôt le film en beauté en nous assenant non pas une grosse claque dans la gueule mais plutôt de petites pichenettes bien senties à l’arrière du crâne… Juste ce qu’il fallait pour nous laisser une bonne impression, en somme.

Redoutablement efficace, Red Eye est un petit thriller honnête, abouti et divertissant, qui vaut certes le détour pour la maîtrise scénaristique indéniable dont il fait preuve, mais aussi pour le plaisir tout simple de voir Cillian Murphy sortir de ses gonds… A bon entendeur !

Par Emmanuelle Ignacchiti

Quitter la version mobile