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Scanners

Affiche du film "Scanners"

© 1981 Canadian Film Development Corporation (CFDC) − Tous droits réservés.

Scanners_poster

La CONSEC Corporation cherche à regrouper les Scanners, des mediums aux pouvoirs surnaturels. Elle recrute un jeune medium, Cameron Vale, pour détecter tous les Scanners qui sont opposés aux agissements de la société. Cameron va alors découvrir les aspects cachés de cette périlleuse mission.

Sorti en 1981, Scanners est depuis communément considéré comme l’un des films cultes du genre science-fiction / horreur et renfermait déjà tous les thèmes chers au canadien David Cronenberg (Videodrome ; La Mouche ; eXistenZ) qu’il ne cessera d’explorer dans la plupart de ses œuvres tels que, entre autres, la science, la psyché, le corps en général ainsi que ses multiples métamorphoses. Si le déroulement narratif de Scanners a quelque peu mal vieilli, force est de reconnaitre que son impact demeure toujours aussi fort tant le sujet est abordé avec une incroyable précision témoignant d’une réelle passion du réalisateur pour tout ce qui touche de près ou de loin à la rencontre désastreuse entre le domaine médical et l’horrible.

Dès le départ, le film soulève bon nombre d’interrogations qui ne seront explicitées qu’au fur et à mesure que l’intrigue se déploie à son rythme – rythme qui, il faut bien l’avouer, pourra paraitre très lent à certains – : qu’est-ce qu’un « Scanner » ? D’où viennent-ils ? Quel est le rôle de la CONSEC Corporation ? Pourquoi les Scanners déviants veulent-ils éliminer la société qui se targue de les avoir « engendrés » ? La plupart de ces questions resteront en suspens jusqu’au dénouement final qui s’affairera alors à nous soumettre une profusion de réponses pour le moins inattendues. De fait, le principal défaut de Scanners reste son déséquilibre rythmique plutôt handicapant : tantôt dynamique, tantôt traînant la patte, la narration se déroule de manière inégale, voire même maladroite ; ce qui comporte le désavantage de faire passer le spectateur d’un état réactif de profonde attention à celui de morosité passive. Les moments de révélations d’ordre médical et psychanalytique demeurent très intéressants car traités en profondeur avec beaucoup de crédibilité ; en revanche, l’enquête en elle-même reste confuse et assez molle, peinant parfois à avancer et engendrant d’inévitables longueurs qui viennent casser le rythme du film.

Néanmoins, Scanners se démarque des autres productions de son époque par son scénario intelligent et le traitement ingénieux des « combats » télékinésiques entre Scanners. En effet, ceux-ci détiennent le pouvoir de « sonder » l’esprit de n’importe quel individu lambda sans problèmes, mais pour ce qui est des autres Scanners, la victoire revient à celui qui saura faire preuve du plus de maîtrise sur ce pouvoir hors du commun. Cet état de fait amène donc de nombreux affrontements psychiques impitoyables principalement rendus à l’image par le jeu des acteurs qui multiplient les grimaces (parfois un peu ridicules) et un champ-contrechamp récurrent qui vient illustrer l’effort gargantuesque de chacun pour pénétrer l’esprit de l’autre. A ce sujet, la célèbre scène de la tête qui éclate après que son propriétaire ait été sondé par un Scanner malveillant, vers le début du film, reste toujours aussi impressionnante car redoutablement bien réalisée malgré les limites des effets spéciaux de l’époque. Dans un élan de porter son sujet à son paroxysme, Scanners multiplie les situations improbables : une femme sondée par un bébé-scanner encore dans le ventre de sa mère ; le héros Cameron Vale qui réussit à sonder l’ordinateur de la CONSEC Corporation via les circuits électroniques d’une cabine téléphonique, etc. Fort heureusement, Cronenberg maîtrise parfaitement son sujet, ce qui nous permet d’adhérer sans problème à ces phénomènes surréalistes.

Mis à part le très charismatique Darryl Revok, très justement interprété par un tout jeune Michael Ironside (Total Recall ; Starship Troopers ; The Machinist), et le mystérieux Professeur Ruth (Patrick McGoohan, L’Évadé d’Alcatraz ; Braveheart), on peut regretter que les personnages n’aient pas bénéficié d’un traitement moins superficiel. En effet, les héros Cameron Vale et Kim Obrist, à qui l’on est censé s’identifier, sont d’une fadeur atterrante, tandis que les sbires de Revok ne parviennent à aucun moment à constituer une menace réellement effrayante, tant la supériorité de Cameron est écrasante dès le début du film. L’affrontement final entre les deux antagonistes Cameron et Darryl est quant à lui particulièrement bien réussi : oscillant sans cesse entre horreur visuelle et tension dramatique grâce aux effets spéciaux tout bonnement magistraux et à la composition envoûtante d’Howard Shore, la fin de Scanners justifie à elle seule le statut d’œuvre culte du film. De plus, l’issue de cet ultime affrontement se révèlera pour le moins surprenante même si rapidement expédiée et plutôt avare en explications rationnelles.

Bien que bourré d’imperfections, maladroit et devenu quelque peu obsolète au fil des années, Scanners n’en reste pas moins une œuvre culte très forte en suspense qui nous plonge au cœur des mystères insolubles de la science et de la psyché humaine avec beaucoup de subtilité et d’humilité. Un film à voir absolument pour mesurer toute l’étendue du génie Cronenberg, mais aussi et surtout pour se replonger avec nostalgie dans l’horreur façon « seventies » et ainsi se retrouver face aux préoccupations spirituelles de l’époque qui demeurent toujours autant d’actualité.

Par Emmanuelle Ignacchiti

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