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Tale of Tales

Affiche du film "Tale of Tales"

© 2015 Rai Cinema − Tous droits réservés.

Il était une fois trois royaumes voisins où dans de merveilleux châteaux régnaient rois et reines, princes et princesses : un roi fornicateur et libertin, un autre captivé par un étrange animal, une reine obsédée par son désir d’enfant… Sorciers et fées, monstres redoutables, ogre et vieilles lavandières, saltimbanques et courtisans sont les héros de cette libre interprétation des célèbres histoires de Giambattista Basile.

Vous, qui posez vos yeux sur ces quelques lignes… Qui que vous soyez, votre âme a été nourrie par la sagesse des contes. Mais si Charles Perrault et les Frères Grimm ont émerveillé votre enfance, il y a fort à parier que le nom de Giambattista Basile s’avère plus obscur. Pourtant, cette idole du folklore napolitain est l’auteur du premier recueil de contes de la littérature européenne : Le Pentamerone – ou Conte des contes.
Oeuvre matricielle, ce recueil fut la source du dernier long-métrage de Matteo Garrone : Tale of Tales (Il racconto dei racconti), présenté cette année en compétition officielle à Cannes.

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Réalisateur de Gomorra et de Reality – respectivement primés en 2008 et en 2012 – le cinéaste italien a choisi d’adapter trois histoires de Basile parmi une multitude d’autres récits. Servi par un casting aussi prestigieux que protéiforme (Salma Hayek, Toby Jones, Vincent Cassel) et tourné dans la langue de Shakespeare, Tale of Tales souligne toute l’universalité des contes qu’il exploite.

Articulé par une narration prenant le parti d’entremêler les récits, le film parvient à trouver – au cœur des thématiques jadis abordées par Basile – un écho avec notre époque. En oscillant entre le réel et le fantastique (dissemblance chère à Matteo Garrone), l’œuvre explore la vulnérabilité de dirigeants qui, malgré le faste qui les entoure, succombent à leurs angoisses : meurtris par le culte de l’apparence, le respect des conventions sociales, ou portés par un désir d’émancipation, les personnages intriguent par l’apparente modernité de leurs pérégrinations.

Cet ogre ne peut pas se curer le nez

Succession ininterrompue de tableaux insolites, porteurs d’images aussi marquantes qu’une vieillarde décharnée, une puce vampirique ou une étreinte entre jumeaux albinos, Tale of Tales est un film perclus de contrastes, dans lequel le mélange des genres s’opère parfois avec grâce. Le désespoir du personnage de Salma Hayek rompt avec le cabotinage de Vincent Cassel et la malice pathétique de Toby Jones, tandis que le rire et la légèreté laissent souvent place à une horreur grotesque ou à un érotisme latent.
Réalisé dans le sud de l’Italie, et privilégiant l’utilisation de décors baroques et d’animatroniques, Tale of Tales fait preuve d’un traditionalisme académique souvent maniéré,  sublimé par la photographie du très vénérable  Peter Suschitzky (collaborateur de longue date de David Cronenberg) et par la production design de Dimitri Capuani. Mais si la fange et le luxe se côtoient sans heurt grâce à une cohérence artistique exceptionnelle (malgré la diversité des environnements présentés), le découpage séquentiel de l’œuvre laisse à désirer…

Okay, là, exit les blagues moisies, c’est de tooooute beauté

Matteo Garrone et ses coscénaristes (Edoardo Albinati, Ugo Chitti et Massimo Gaudosio), portés par une ambition folle et soucieux de livrer un résultat organique, ont en effet opté pour une narration fluctuante qui – loin de susciter une vive implication émotionnelle – plonge le spectateur dans une langueur lénifiante. La structure des contes étant brisée, les récits s’étiolent et perdent de leur pureté avant d’être réunis au cours d’une séquence finale réussie, mais ne parvenant pas à faire pardonner les nombreux égarements mirifiques qui ankylosent l’œuvre.

Plus contemplatif que viscéral, Tale of Tales laisse – en dépit d’une myriade de qualités- une inévitable impression de gâchis. Reste la musique d’Alexandre Desplat, aussi sublime que mal employée…

Par Fabio MDCXCVII

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