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L’Exorciste

Affiche du film "L'Exorciste"

© 1973 Hoya Productions − Tous droits réservés.

Dans son roman homonyme publié en 1971, William Peter Blatty s’inspire du cas réel de Robbie Mannheim, un jeune garçon dont l’histoire sera racontée plus tard dans le très honorable téléfilm de Steven E. De Souza “Exorcism” et dans le documentaire “The Exorcist Files”, s’offrant toutefois la liberté de transformer son jeune protagoniste en héroïne. Après être passé entre les mains de Hitchcock, Kubrick et même Boorman – qui réalisera sa suite – le scénario finit par atterrir sur le bureau d’un William Friedkin alors tout juste auréolé de succès avec French Connection. Le choix du studio s’avérera judicieux puisque la démarche “cinéma vérité” accentue évidemment le côté réaliste de l’œuvre, mais surtout l’entraîne dans une approche jusqu’au-boutiste aussi dérangeante que jubilatoire, quitte à flirter parfois avec le sensationnalisme.
Depuis la genèse du mal fixée en Irak – dans une terre ancestrale à forte connotation spirituelle et religieuse – jusqu’à sa mise en scène proche du documentaire avec ses plans de caméra portée, Friedkin ne triche pas. Ni dans la description et l’évolution du mal qui s’empare de Regan, victime des assauts d’un démon sans pitié côté religion, ni dans la batterie de tests éprouvants que la science lui fait subir pour tenter de la soigner. Cette même science qui bientôt, se déclarant impuissante, conseillera à la maman désemparée de se tourner en dernier recours vers l’église.

C’est par l’association d’un réalisme austère à un thème fantastique que William Friedkin est parvenu à transformer même les plans les plus neutres en briques du cauchemar, et ainsi à distiller tout au long du récit une terreur sourde et pernicieuse. L’Exorciste n’est en effet pas tant un film d’horreur primaire qu’un drame usant de ressorts horrifiques pour traiter de thèmes universels.

Le réalisateur nous plonge, progressivement dans cette histoire de possession qui touche une petite fille de 12 ans, Regan, en adoptant le point de vue de sa mère, interprétée magistralement par Ellen Burstyn. En encrant cette histoire surnaturelle dans une trame réaliste et dans un contexte urbain et familial, le réalisateur réussit, avec une efficacité redoutable, à créer un suspense et une ambiance unique au fur et à mesure de la possession démoniaque, dont est victime la petite Regan qui passe progressivement sous l’emprise du mal. Le scénario, brillant, s’attache tout particulièrement à la psychologie des différents personnages de l’histoire, et accroit ainsi la terreur qu’éprouve le spectateur face aux scènes chocs et traumatisantes que le réalisateur accumule et qui restent aujourd’hui définitivement cultes ( la scène de masturbation avec le crucifix, la tête qui tourne à 180°, le vomi verdâtre qui traverse la pièce…). Le travail sur le son (sa voix satanique ) et le maquillage de la petite Regan (son visage monstrueux, reste dans toute les mémoires !) est exceptionnel et que dire de la musique, envoutante et inquiétante du film, qui reste aujourd’hui l’une des compositions les plus connue du cinéma fantastique…

Grande œuvre de cinéma et film charnière dans l’histoire de l’horreur moderne puisqu’il va populariser le genre auprès du grand public, L’Exorciste rencontrera un succès phénoménal et sa rentabilité sera telle que les producteurs et les studios miseront des budgets plus conséquents sur l’horreur. Friedkin illustre avec génie l’éternel combat du bien contre le mal et inscrit son travail, comme beaucoup d’autres lors de cette décennie et une partie de la suivante (La Dernière maison sur la gauche, Massacre à la tronçonneuse, Evil Dead…), dans une véritable démarche jusqu’au-boutiste. Un cinéma sans concession, malheureusement devenu rare aujourd’hui, pour un coup de génie tel qu’aucun film d’exorcisme ne sera jamais parvenu à l’égaler.

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