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Massacre à la tronçonneuse

Affiche du film "Massacre à la tronçonneuse"

© 1974 Vortex − Tous droits réservés.

Avant d’aborder “Massacre à la tronçonneuse”, il faut replacer le film dans son époque, lors de son tournage à l’été 1973. Les États-Unis sont sur le point de rappeller leurs troupes du Vietnam, Charles Manson et sa famille ont sérieusement ébranlé l’image peace and love des Hippies, et le scandale du Watergate a remis en question la confiance des Américains envers leurs dirigeants. C’est ce dernier point qui a inspiré l’envie à Tobe Hooper de tourner “Massacre à la tronçonneuse”, et on le comprend, car dans une société
ou l’ennemi communiste est traqué à l’autre bout du monde, qu’en est-il de la menace intérieure ? Où le gouvernement, les voisins ou des mouvements présentés comme pacifistes représente un potentiel danger pour autrui ? A ce titre, le film commence par un texte déroulant qui nous résume l’histoire que l’on s’apprête à voir. On reste dans le côté hyper-réaliste avec un enchainement d’interventions radiophoniques décrivant des faits divers sordides, nous rappellant que oui, peut importe le territoire, le danger est partout.

Cette charge politique et sociologique, le réalisateur l’étalle à plusieurs moments dans son métrage, car après tout, le dialogue entre l’autostoppeur et nos malheureux protagonistes sur les nouvelles méthodes d’abattre du betail n’est-il pas une allégorie sur les soldats qui tombent au Vietnam ? La famille de dégénérés cannibales ( qui n’a pas de nom dans cet opus) n’est elle pas une métaphore d’un monde où pour réussir certains seraient prêt à bouffer les autres ? Au delà du discours politique qui passera au-dessus
de la tête de beaucoup, “Massacre à la tronçonneuse” n’a pas volé sa réputation de film d’horreur ultime, bien au contraire.

© 1974 Vortex − Tous droits réservés.

Bien que dans ce premier opus, ainsi que ses suites, la menace est une famille entière, “Massacre à la tronçonneuse” est avant tout la création d’une icône du cinéma de genre, Leatherface. Inspiré par Ed Gein, serial killer ayant defraillé la chronique dans les années 50, Leatherface est un boogeyman qui, aujourd’hui encore, est terriblement efficace, et sa première apparition, que ce soit au niveau de la mise en scène ou du montage. Cette première scène frôle la perfection, et devrait être étudiée par n’importe quel inspirant cinéaste desireux de faire un film d’horreur.

Loin d’être une machine à tuer froide et sans émotion, on debine qu’il y a un être humain derrière le monstre, notamment à travers la scène où après avoir tué sa troisième victime,il se précipite à la fenêtre pour voir si il y a quelqu’un, puis il s’assoit brusquement, troublé, comme dépassé par les evenements. Leatherface est à l’image du reste de sa famille, une case en moins certes, mais tout aussi humain que leurs victimes. Ces personnages font l’ambiance générale du film, ce qui contribue grandement à sa réussite. Tourné sous un soleil de plomb, parfaitement rendu à l’écran, il se dégage de “Massacre à la tronçonneuse” une atmosphère poisseuse et opressante. La mise en scène de Tobe Hooper est radicale et réaliste. Au delà de scènes tout simplement glaciales ( la scène du réfrigirateur est un pur moment de terreur, la mythique scène du repas…), la réalisation est exemplaire tout au long du métrage.

Hooper a su parfaitement placer sa caméra, donnant à son métrage un aspect documentaire réussi, accentuant ainsi le réalisme du film, au point de pousser le concept de point de vue narratif interne dans des rentranchements inégalés jusque là. Ceci donne au spectateur l’impression amère d’être témoin des évenements, on devine aisement pourquoi le film a écopé de multiples interdictions dans plusieurs pays lors de sa sortie, dont certaines n’ont été levées que très recement. Vous l’aurez compris : on ne regarde pas “Massacre à la tronçonnneuse”, on vit ce chef d’oeuvre qui n’a rien perdu de sa force et de sa hargne presque 50 ans après sa sortie.

Par Jonathan Roch

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